Paroisse Saint Loup


Sommaire > Vie de la paroisse > Homélies > Archives > 2017 > septembre à novembre 2017 > Vingt-deuxième dimanche du Temps Ordinaire – Année A

Vingt-deuxième dimanche du Temps Ordinaire – Année A

S 02 et D 03 septembre 2017 église de Saint-Barthélémy-du-Gua et église Saint Jean-Baptiste de Vif

Se laisser séduire par l’amour infini du Seigneur

Jérémie appartient à la lignée des grands prophètes qui préfigurent le Christ souffrant. Il a reçu du Seigneur la lourde charge d’appeler le peuple à la conversion tout en lui annonçant les conséquences malheureuses de ses fautes : invasion babylonienne, destruction du temple, exil, etc. Cette mission impopulaire le livrera à la persécution et il échappera de peu à la mort.
A maintes reprises, le prophète tente de se soustraire à l’emprise du Seigneur. Il se plaint de son sort (les jérémiades) et regrette même d’être né. Malgré cela, il confesse toujours la fidélité de Dieu qui veille sur lui et le caractère irrésistible de sa Parole : un feu brûlant, dévorant comme l’Esprit, qui s’empare de lui corps et âme et auquel il ne peut que s’abandonner avec amour.
Jérémie n’a pu résister au Seigneur. Le Christ, Parole ultime, totale, de Dieu, n’a reconnu d’autre chemin de Vie que d’offrir librement sa vie sur la Croix. Il a exhorté ses disciples à le suivre dans cette voie de salut.
Quelques années après la résurrection de Jésus, Paul, qui persécutait les chrétiens, a été entièrement saisi et transformé par le Christ : avec le Christ, je suis crucifié. Je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi. Ce que je vis aujourd’hui dans la chair, je le vis dans la foi au Fils de Dieu qui m’a aimé et s’est livré lui-même pour moi (Galates II, 19-20). C’est donc fort de son expérience vécue dans la tendresse de Dieu que Paul peut entraîner les Romains… et nous autres à l’imiter.
De quelle perte, de quel sacrifice parle Jésus lorsqu’il affirme : Celui qui perd sa vie à cause de moi la trouvera ? Paul écrit : Présentez votre personne toute entière en sacrifice vivant (2ème lecture). Une oblation vivante et non pas morte ou mortifère, voilà ce qu’attend Jésus de celui qui veut le suivre. Que vaudrait en effet de perdre sa vie au sens propre du terme, en croyant plaire à Dieu ? Puisqu’il s’agit d’offrir sa vie, ce qui est tout différent !
Se laisser transformer (2ème lecture), se laisser séduire (1ère lecture), en termes contemporains « s’abandonner » entre les bras de Dieu, pour qu’il nous élève avec Lui qui s’est incliné jusqu’à notre petitesse. Certes, cela suppose un travail sur soi jamais achevé, qui nécessite bien des acceptations, bien des renoncements… A notre soif de toute-puissance, qui masque notre peur de « perdre », notre crainte de souffrir. Pierre lui-même refuse l’annonce de la Passion, la souffrance annoncée de son maître qui pourrait entraîner la sienne.
Mais qui perd sa vie à cause de moi la gardera. Oui, celui qui se laisse séduire et transformer par Dieu y gagne la Vie, dès maintenant. Car la Vie que Dieu procure n’est pas un simulacre de vie, que l’on peut perdre sans crainte puisqu’elle s’appuie sur des biens illusoires et temporaires, mais une Vie féconde, source de joie et de partage, source de paix et d’amour. Alors, puissions-nous chaque jour du « reste de notre vie » choisir de suivre Jésus et passer par la porte étroite qu’il est venu élargir pour que chacun l’emprunte… s’il le désire.
Voici qu’une nouvelle année s’avance pour ceux qui sont arrimés au rythme scolaire ! Et si nous la placions tout entière dans la dynamique que nous propose la liturgie de ce dimanche de rentrée ?
Nos vies sont tissées de fils divers qui s’entrecroisent. Si nous avons l’initiative de certains, d’autres, plus ou moins bienveillants, nous arrivent de l’extérieur. Les difficultés ne manqueront pas. Notre manière de les aborder, soit en réagissant à ce que l’on subit, soit au contraire en agissant positivement, se révélera déterminante pour la force et la qualité de notre vie.
De manière plus ou moins aigüe ou même, hélas, dramatique, la Croix se dressera ici ou là sur notre route. S’abattant sur nous, elle peut nous faire vaciller au point que nous voudrions, comme Jérémie, déserter nos responsabilités… Absurde, frappant nos proches, venant contrecarrer nos espérances d’un monde meilleur, semblant s’opposer à la promesse de vie divine, elle peut nous révulser au point que nous voudrions, comme Pierre, nier l’évidence. Des réactions bien compréhensibles mais qui nous étriquent et nous enferment sur nous-mêmes en plus d’être inopérantes.
Sans prétendre donner réponse à la question du mal, Jérémie et le psalmiste, puis le Christ surtout, imité ensuite par Paul, nous ouvrent une autre voie. Elle est étroite, certes, mais combien libérante pour celui qui consent à la folie de l’amour. Il s’agit de reprendre l’initiative pour se laisser séduire par le Seigneur. Il s’agit de renoncer à nous-mêmes et à nos raisonnements apparemment sages pour se livrer tout entiers au Christ, sûrs qu’il nous conduit à la Vie.

Père Thibault NICOLET

Références des textes liturgiques :
Jérémie XX, 7-9 ;
Psaume LXII (LXIII) ;
Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains XII, 1-2 ;
Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu XVI, 21-27.