Paroisse Saint Loup


Sommaire > Vie de la paroisse > Homélies > Archives > 2018 > Septembre à Novembre 2018 > Commémoration de tous les fidèles défunts – Année B

Commémoration de tous les fidèles défunts – Année B

Vendredi 02 novembre 2018 église Saint Jean-Baptiste de Vif

L’heure de la mort

La Commémoration des fidèles défunts, le 2 novembre, est l’occasion de prier pour tous les défunts et de méditer sur ce qu’est la mort chrétienne. Unie à celle du Christ, elle est une remise entre les mains du Père.
De plus en plus de chrétiens, et c’est à déplorer, meurent sans l’assistance des sacrements et l’on évite même parfois volontairement d’appeler un prêtre à leur chevet pour « ne pas les effrayer ». Il semble qu’on ait perdu le sens chrétien de la mort. Et c’est pourquoi il convient d’en reparler, spécialement en ce 2 novembre, où nous prions pour « nos morts ».
Il faut reconnaître qu’une certaine prédication sur la mort, notamment au XIXème siècle, a été parfois de fort mauvais goût et nous a rendu la méditation sur ce sujet relativement insupportable. Mais ce n’est pas une raison pour ne plus la regarder en face, car la mort, elle, nous fait toujours face ; il faut au contraire chercher à en donner un éclairage théologique plus adéquat. Comment parler de la mort chrétienne sans dévaloriser la vie ? Que représente donc la mort pour un chrétien ? Comment la « vivre », si l’on peut dire ?
Pour comprendre la signification de la mort dans une lumière proprement chrétienne, il faut commencer par contempler la mort de Jésus. L’heure de notre mort ne peut être éclairée vraiment qu’à la lumière de la sienne.
Or ce qui caractérise sa mort, c’est qu’elle est portée par un acte d’amour infini et tout-puissant. En tant qu’homme, le Christ meurt vraiment sur la croix ; mais en tant que Dieu, il assume cette séparation mortelle entre son âme et son corps, et c’est sa vie divine qui a le dernier mot. Au moment où Jésus meurt sur la croix, la mort d’un homme se trouve ainsi, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, unie à la vie divine, et donc à l’amour éternel de Dieu. Pour la première fois, la mort cesse donc d’être quelque chose de purement négatif pour devenir l’expression la plus ultime de l’amour de Dieu pour nous : « Nul n’a de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis » (Jean XV, 13).
Le Christ, en acceptant dans l’obéissance à son Père de mourir pour sauver chacun d’entre nous, a fait ainsi de sa mort une occasion unique de manifester son amour. Humainement, personne ne peut faire ça. On ne peut pas mourir pour montrer à quelqu’un qu’on l’aime. Ce serait de la pure folie, car la mort implique la disparition de l’individu, alors que l’amitié suppose la présence. Mais le Christ, parce qu’il est Dieu et pas seulement homme, demeure présent malgré sa mort, et il peut ainsi utiliser sa mort pour manifester l’absolu de son amour pour son Père et pour nous.
Le propre de la mort du Christ est que l’amour divin est plus fort que la mort. Il en résulte par la suite que toute mort unie à celle du Christ, par la grâce, participe en quelque sorte, au même mystère.
Certes, après la mort du Christ, la mort n’a pas disparu. Apparemment, notre condition humaine n’a pas changé. Nous sommes toujours aussi mortels qu’avant la Croix et la Résurrection, et cela durera jusqu’à la fin du monde. Mais la mort a changé de signification. Unie par la grâce à celle du Christ, elle est désormais portée par l’amour infini de Dieu et peut, de ce fait, devenir une victoire d’amour et non plus seulement un échec. Pour le disciple du Christ, la mort est devenue l’occasion d’entrer dans l’intimité de Dieu, selon la promesse de Jésus au Bon Larron : « Aujourd’hui tu seras avec moi au paradis » (Luc XXIII, 43).
La mort est enfin la rencontre de deux libertés, celle de Dieu et la nôtre. C’est en effet une libre décision de la part de Dieu (même si on peut avoir l’impression, de l’extérieur, que c’est telle maladie ou tel accident qui en est la cause) et c’est, dans une certaine mesure, une libre acceptation de l’homme à qui il revient de dire son dernier « oui » à Dieu. L’homme meurt, qu’il le veuille ou non, bien sûr ; mais il lui revient plus ou moins consciemment d’acquiescer ou non à la volonté de Dieu, et de choisir ainsi la manière dont il meurt : dans le refus ou dans l’abandon aimant.

« Heureux ceux qui s’endorment dans le Seigneur. »

Père Thibault NICOLET

Références des textes liturgiques :
Livre de Job XIX, 1. 23-27a ; Psaume CII (CIII) ;
Lettre de saint Paul Apôtre aux Romains VIII, 31b-35. 37-39 ;
Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean V, 24-29