Paroisse Saint Loup


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Quatrième dimanche de Pâques 2019 – Année C

dimanche 12 mai église Saint Jean-Baptiste, Vif

Jésus Bon Pasteur : de la royauté sacrale au sacerdoce existentiel

Dans la synagogue d’Antioche, Paul prêche Jésus-Christ ; il y affronte l’auditoire houleux des Judaïsants. La joie des païens convertis le pousse à un choix décisif : dorénavant il annoncera l’Évangile aux Gentils.
Dans le sillage de Paul, nous avons chanté ce psaume en action de grâce pour l’évangélisation des païens. Nous l’avons aussi chanté pour louer le Bon Pasteur de l’évangile : nous sommes son troupeau.
Au ciel, la foule innombrable des bienheureux est vêtue de blanc, la couleur de la victoire obtenue par le sang rédempteur. Au ciel, l’agneau immolé, en Bon Pasteur, conduit et abreuve ses brebis aux sources de l’eau vive.
En disant « Je suis le Bon Pasteur », Jésus révèle à la fois sa transcendance divine – Je suis – et sa responsabilité auprès des brebis de son Père. Il affirme : « Le Père et moi, nous sommes un ».
Dans l’ancien Orient, nomade, le pasteur qui mène ses bêtes et prend soin d’elles est figure du roi. En se désignant comme pasteur, Jésus revendique donc la fonction royale. Bon pasteur, il est le roi messianique, celui qui a reçu l’onction pour guider le peuple sur le chemin conduisant à Dieu. Il est celui qui veille avec sollicitude sur chacun de ceux qui lui sont confiés en même temps que sur l’honneur de Dieu. C’est le roi d’ascendance davidique qu’attendaient les prophètes. Médiateur entre Dieu et le peuple, il est celui qui ramène les égarés au bercail, celui qui réconcilie les hommes avec Dieu.
La revendication de Jésus n’est donc pas mince : il se désigne comme le Messie attendu. Mais il n’en reste pas là dans ses prétentions. Lui, le parfait lieutenant, se déclare égal au capitaine, c’est-à-dire à Dieu lui-même. Après avoir dit que le Père qui lui a donné le troupeau est plus grand que tout, il s’affirme le Fils de Dieu et son égal : « Le Père et moi, nous sommes un ». C’est donc bien Jésus qui se fait l’égal de Dieu. C’est plus que ce que peuvent supporter ses auditeurs : « Ce n’est pas pour une œuvre bonne que nous te lapidons, mais pour un blasphème et parce que toi, n’étant qu’un homme, tu te fais Dieu ». Les interlocuteurs de Jésus ne s’aperçoivent pas que c’est en lui que s’accomplit la prophétie d’Ézéchiel : « Voici que j’aurai soin moi-même de mon troupeau et je m’en occuperai. Comme un pasteur s’occupe de son troupeau quand il est au milieu de ses brebis éparpillées, je m’occuperai de mes brebis. Je les retirerai de tous les lieux où elles furent dispersées, aux jours de nuées et aux jours de ténèbres » (Ézéchiel XXXIV, 11-12).
Mais ce que les contemporains du Seigneur comprennent le moins, c’est ce que celui-ci leur dit à propos de son Père. Car le Dieu d’Israël n’est pas le génie de la lampe d’Aladin ! Aux bénéficiaires de la multiplication des pains, d’avis de le faire roi, Jésus répond en se dérobant. Il n’est pas prestataire de services comme les divinités ou les empereurs. Il n’est pas venu procurer du pain et des jeux en dispensant les gens de leurs responsabilités ; il n’est pas non plus un distributeur automatique de grâces. Il déjoue plutôt l’attitude magique des païens qui consiste à trouver la bonne combinaison, le bon code, les bonnes formules qui contraindraient toute divinité à se mettre à notre service.
Le Pasteur choisi par Dieu va être rejeté par ceux à qui il a été envoyé, lui qui, comme Verbe éternel (bien mieux que les prophètes), est l’exégète du Père, le révélateur de Dieu et des hommes créés à son image. C’est alors que va apparaître la dimension sacerdotale. Par son obéissance sacrificielle au dessein salvifique du Père, Jésus va devenir à la fois victime et prêtre : victime, parce qu’il va être rejeté comme bouc émissaire : « Il vaut mieux qu’un seul meure pour tout le peuple » et prêtre parce qu’il assume ce rejet et en fait la matière de son offrande réconciliatrice au Père. Jésus est ainsi - de par sa fonction (messie), de par son être (le Verbe) et de par sa Passion (l’agneau immolé) – prêtre, prophète et roi. Et c’est cette triple qualité qu’il lègue à ceux qu’il institue (au soir du Jeudi saint) en vue de la pérennité de sa mission. Désormais les fonctions de prophète et de pasteur confluent avec celle de prêtre pour ne plus former qu’une triple mission d’enseigner (prophète), de sanctifier (prêtre) et de gouverner (roi).

Père Thibault NICOLET

Références des textes liturgiques :
Actes des Apôtres XIII, 14.43-52 ; Psaume XCIX (C) ;
Livre de l’Apocalypse VII, 9.14b-17
Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean X, 27-30.