Paroisse Saint Loup


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Trentième dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Dimanche 27 octobre 2019 église Saint Jean-Baptiste de Vif

Le publicain n’est justifié que parce qu’il s’est converti

Dans son journal de croyant, le sage Ben Sira expose de très belles pensées sur la prière des humbles, seule capable de « traverser les nuées » et d’obtenir la faveur de Dieu.
La louange confiante du pauvre est également au cœur du psaume de ce dimanche. Faisons donc nôtre cette prière, car nous savons que le psalmiste connaît la sollicitude de Dieu pour les petits, pour ceux qui le servent avec un cœur humble et contrit.
Quelques jours avant sa décapitation, les dernières phrases de l’Apôtre Paul depuis sa prison romaine nous sont ensuite rapportées. Peu importent toutes ces épreuves, tous ces abandons, toutes ces trahisons : le Seigneur, « le juge impartial » est présent, sur la ligne d’arrivée, pour lui ouvrir le Royaume des Cieux.
Et le thème de l’humilité est encore au cœur de la page d’évangile de ce dimanche : « Deux hommes montèrent au Temple » pour rencontrer leur Dieu dans la prière : une parabole qui commence bien ! Le pharisien ne se contente pas de se donner des coups d’encensoir, il fait en même temps l’examen de conscience du publicain !… Qui donc ne se reconnaîtrait dans au moins l’un de ces deux « immortels » ?
Tous ces textes sonnent pour nous comme autant d’avertissements. Que notre prétendue humilité ne soit donc pas un prétexte à la médiocrité. Que notre activité ne soit pas un prétexte à l’orgueil. Et Paul nous avertit : « Qu’as-tu que tu n’aies reçu ? » Ayons donc cran et humilité. En nous dépossédant, nous laissons à Dieu toute latitude pour faire de nous l’instrument de choix que nous ne saurions être par nous-mêmes et dont Il a cependant besoin pour que l’Évangile continue à être annoncée.
Pour en venir plus précisément sur l’évangile de ce dimanche, il me semble que l’on va un peu trop vite au-devant de la conclusion de cet évangile. Les « paroles de la croix » n’entraînent pas aussi vite notre adhésion ! Pourquoi adhérons-nous si facilement à la leçon de cette parabole ? Serait-ce que nous nous retrouvons vraiment bien dans le personnage du publicain, c’est-à-dire de ce pécheur public qui retourne chez lui, justifié, alors que le pharisien ne l’est pas, en dépit de ses efforts ? Consciemment ou non, nous nous satisfaisons du dénouement de la parabole. Cela nous paraît un encouragement à notre médiocrité. Nous nous savons pécheurs et nous ne nous en cachons d’ailleurs pas exagérément. Nous pensons affirmer notre liberté en prenant des distances avec l’Église ou avec l’Évangile. Nous sommes donc bien des pécheurs publics. On accepte de suivre le Christ, mais à distance et selon un itinéraire adapté à nos désirs, jusqu’à voir une certaine élégance à ne pas se donner tout entier. Mais nous sommes bel et bien des dilettantes ou des mercenaires, non pas des serviteurs. Nous nous savons pécheurs et nous en prenons parti, c’est-à-dire que nous contractons, consciemment ou non, une sorte de pacte de non-agression avec la tiédeur et le péché.
Quant au pharisien, il est d’une autre trempe et, du coup, il nous dérange. Il est prêt à tout risquer pour Dieu et il met tout son honneur à servir Dieu. Le pharisien est le type d’homme qui fascine les gens ayant du caractère. On est au fond bien content qu’il se fasse remettre à sa place par Jésus. Les gens qui nous dépassent par leur zèle finissent par nous agacer : ils remettent en cause notre tiédeur ! Jésus remet ici en place le pharisien, et c’est à juste titre car le propre des gens zélés consiste souvent à se rendre odieux par leur morgue. Et cela, Jésus ne saurait l’accepter. Lui qui est rigoureusement sans péché ne s’enorgueillit jamais de sa condition divine. Au contraire, il se fait doux et humble de cœur. Le Christ supporte d’autant moins l’attitude orgueilleuse des pharisiens qu’il les connaît par coeur. Les pharisiens sont appelés à former une élite de serviteurs. A contrario, cela ne signifie pas que Jésus canonise les publicains : le publicain ne rentre en effet justifié chez lui que parce qu’il se reconnaît pécheur. Mais cela suffit-il pour être justifié ? Si on reconnaît vraiment son péché, cela signifie que l’on a pris conscience d’avoir blessé son prochain. Et l’on peut dès lors chercher à changer de vie car ressentir la brûlure du péché commis est très souvent le premier pas d’une démarche de conversion. On ne saurait se satisfaire d’être pécheur pardonné, il s’agit de devenir un pécheur transformé en répondant à l’amour par l’amour.

Père Thibault NICOLET

Références des textes liturgiques :
Livre de Ben Sira le Sage XXXV, 12-14.16-18 ; Psaume XXXIII (XXXIV) ;
Deuxième Épître de Saint Paul Apôtre à Timothée IV, 6-8.16-18 ;
Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc XVIII, 9-14.