Paroisse Saint Loup


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Trente-troisième dimanche du Temps Ordinaire – Année C

Dimanche 17 novembre 2019 église Saint Jean-Baptiste de Vif

Journée des pauvres, Jour du Seigneur

Le dimanche est le « Jour du Seigneur ». C’est le jour où le chrétien célèbre la Résurrection du Christ et donne son temps à l’amour de Dieu et à l’amour du prochain, jour de gratuité et de générosité. Mais cette expression a aussi une autre signification. Pour les prophètes, il est un « Jour de Colère », jour de jugement prononcé contre les orgueilleux et ceux qui ont commis l’injustice. En effet, le péché pèse lourdement sur le cœur des hommes. La barbarie humaine se manifeste de multiples manières et l’histoire humaine regorge d’événements violents. Cependant, le mal n’est plus un obstacle pour le projet de Dieu du fait de la Résurrection du Christ. Le « Jour du Seigneur » devient alors le « Jour du Salut », pour lequel les disciples de Jésus sauront demander miséricorde pour le péché du monde et rester en paix, sans craindre la violence qui se déchaîne. Ce jour est le « Jour du retour du Christ » qu’ils doivent préparer par l’application sérieuse de leur foi dans leur vie quotidienne.
En annonçant, après l’exil, le Jour du Seigneur, « fournaise pour les méchants, jour sans déclin pour les justes », les prophètes invitent toutes les nations, l’univers entier, à se préparer aux derniers jours.
Vers 450 avant J.-C., le retour d’exil et l’enthousiasme qu’il avait suscité sont maintenant de l’ordre du passé. La vie du peuple et le culte du Temple ont repris leur cours à Jérusalem mais sont marqués par de graves relâchements. On perd de vue l’amour que le Seigneur avait si souvent manifesté pour son peuple et la fidélité à sa Parole. Revient alors la lancinante tentation de garder les yeux rivés sur l’apparent triomphe des méchants et des arrogants ; servir Dieu n’aurait donc pas de sens (cf. Malachie III, 13-15). Un prophète, messager du Seigneur (tel est le sens du nom Malachie), intervient dans ce contexte pour secouer son peuple et l’inviter à la persévérance. Il rappelle la parole de Dieu, propose un examen de conscience et proclame la justice du Seigneur. Il veut refonder l’espérance des croyants en leur rappelant la promesse de sa venue. Deux thèmes portent cette espérance, en cette fin du livre du dernier prophète de l’Ancien Testament :
Le Jour du Seigneur. Depuis le prophète Amos, cette expression désigne la fin des temps, le moment où le Seigneur viendra lui-même visiter son peuple pour le gouverner dans la justice. L’image du feu divin purificateur qui lui est associée est classique. Seuls les arrogants et les impies ont à craindre cette fournaise qui consumera tout ce qui n’a pas plus de valeur que de la paille. Pour les croyants fidèles, au contraire, ce feu se manifestera « comme soleil de justice » qui non seulement ne les détruira pas mais surtout les guérira. Cette image, unique dans l’Ancien Testament, sera comprise comme un titre messianique que Jésus accomplira dans son incarnation rédemptrice. Le Cantique de Zacharie en témoigne : « Pour donner à son peuple de connaître le salut par la rémission de ses péchés… quand nous visite l’astre d’en haut. » (Luc I, 77-78)
Dans l’espérance, le psalmiste voit déjà le salut accompli. Il invite l’univers à acclamer le Seigneur « qui vient juger le monde en justice et la terre en droiture. » (Psaume XCVII, 9)
Pour maintenir allumée la petite lampe de l’espérance, saint Paul donne des avis pratiques aux Thessaloniciens : qu’ils se gardent de succomber à la forme de désertion qu’est l’oisiveté ; le travail fait en effet partie du devoir d’état du chrétien.
A la deuxième annonce de la destruction de Jérusalem, Jésus met en garde ses disciples contre les faux prophètes. Il les exhorte à la persévérance au milieu de grandes persécutions. « Ils auront beaucoup à souffrir pour son Nom » : qu’ils soient sans inquiétude.
Pour terminer cette prédication, je souhaite citer l’ultime chapitre d’un livre de Joseph BOUCHAUD intitulé - Les pauvres m’ont évangélisé - , publié en 1968 et qui établit bien le lien entre cette journée des pauvres et la fin de l’année liturgique :
« Il reviendra !
Il me dira, il te dira : « J’ai eu faim, j’étais étranger, j’étais malade, j’étais prisonnier, j’étais sans abri… »
Et, ce jour-là, ni toi, ni moi… personne ne pourra mentir.
Seigneur, je les vois vivre, je te vois vivre. Je les vois aimer, je te vois aimer. Je les vois souffrir, je te vois souffrir. Je les vois espérer, je te vois espérer. Je les vois lutter, je te vois lutter.
Et moi, je me sens profondément heureux. Le bonheur, je crois, c’est de rencontrer quelqu’un qu’on aime, c’est de le rencontrer vivant, c’est de le rencontrer, non comme un riche qui nous méprise, mais comme un pauvre qui veut avoir besoin de nous et qui nous respecte.
Grâce au sacerdoce auquel l’Eglise m’a appelé, grâce à la consécration religieuse par laquelle je me suis donné à Dieu pour le mode ouvrier, j’ai conscience d’avoir en moi la possibilité de réaliser ce pour quoi j’existe. Et cela me rend libre. Tu m’a s comblé, Seigneur, de cette unique plénitude : vivre, en toi, une vie qui serve à faire triompher sur toute la terre ta Révolution de l’Amour.
Et pourtant, je me sens terriblement limité. Je voudrais donner le reste de ma vie dans une favelle d’Amérique du Sud, je voudrais revenir à cette banlieue ouvrière de Paris que j’aime, je voudrais être prêtre à Cuba et couper la canne à sucre avec les travailleurs volontaires, je voudrais aider des jeunes à découvrir un bonheur semblable au mien… Je voudrais avoir cent vies, pour les dépenser aux quatre coins du monde. Je voudrais avoir vingt ans, pour choisir de nouveau la vie que j’ai choisie, et pour m’y préparer mieux encore…
Il reviendra !
Il me dira, il te dira : « J’ai eu faim, j’étais étranger, j’étais malade, j’étais prisonnier, j’étais sans abri… »
Et, ce jour-là, nous avancerons ensemble, en chantant, vers lui.

Père Thibault NICOLET

Références des textes liturgiques :
Livre du prophète Malachie III,19-20a ; Psaume XCVII (XCVIII) ;
Deuxième Épître de Saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens III, 7-12 ;
Évangile de Jésus-Christ selon saint Luc XXI, 5-19.