Paroisse Saint Loup


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Dimanche de l’Epiphanie 2020

dimanche 05 janvier église Saint Jean-Baptiste de Vif

La démarche des mages, un étonnant itinéraire vers la foi en Jésus le Christ

Quel accès les nations ont-elles eu au Christ ? Ce problème auquel fut confrontée la première communauté chrétienne est sans doute en arrière-fond de l’épisode des mages. N’oublions pas que ce récit nous est donné par l’évangéliste Matthieu, qui est le plus sensible à l’enracinement du Christ dans l’Ancienne Alliance. Il destinait probablement son évangile à des juifs devenus chrétiens. Cependant il nous met là en présence de ceux qui ne disposent pas de la richesse de l’Ancien Testament mais qui accèdent cependant à la foi en Jésus.
Isaïe voit prophétiquement monter et se rassembler au Temple l’immense caravane des peuples. Il décrit avec lyrisme cette épiphanie de Jérusalem. La venue de mages païens à Bethléem réalise la prophétie et l’espérance messianique devient réalité.
Et le fils de roi dont il est question dans le psaume de ce dimanche, à qui les nations païennes de Tarsis rendent hommage et que tous les peuples servent, est bien le nouveau-né de Bethléem, le messie venu évangéliser les pauvres en esprit.
Mais les mages venus du lointain Orient étaient-ils les rois de Tarsis et de Saba que ce psaume nous montre, payant tribut et apportant des présents au fils du roi si juste ? Matthieu ne le dit pas expressément, mais le Targoum, la tradition judéo-chrétienne et les Pères de l’Église ont toujours interprété ce psaume en un sens messianique, tout comme le fait la liturgie (introït et offertoire de la solennité de l’Épiphanie). Le monde entier, représenté par les rois de Tarsis, des îles et de Saba (v.10), qui se rend sur la montagne de Sion pour offrir ses présents et ses hommages, accomplit ainsi les promesses grandioses du prophète Isaïe (XLV,14 ; XLIX,23 et LX, 5-17). Non seulement les rois se prosternent aux pieds du Roi messianique de ce psaume, mais toutes les nations, autrement dit le monde païen, le serviront (v.11). L’exégète André Feuillet explique « que les principales caractéristiques du Royaume messianique des prophètes se trouvent synthétisées dans ce psaume : instauration d’une ère de justice et de paix, délivrance des petits et des opprimés, règne d’une durée illimitée, souveraineté sur toutes les nations, prospérité inouïe. » Le roi des Juifs qu’adorent les mages n’est encore qu’un nouveau-né à Bethléem. Nous sommes tous appelés à contempler sa gloire de ressuscité ; au ciel, la cité du Christ-roi est l’épiphanie de la Jérusalem transfigurée du poème étincelant d’Isaïe LX (première lecture).
Le dessein d’amour du Père devient manifeste dans le mystère de l’incarnation rédemptrice du Christ ; venu pour tous les hommes, il dispense aux païens la grâce du salut.
Les premiers adorateurs du Messie-roi, chez Matthieu, ne sont pas des bergers, mais des mages venus d’Orient. Une étoile, puis l’Écriture, ont guidé ces savants païens jusqu’à Bethléem ; ils offrent à l’enfant, lumière du monde, leurs présents royaux et messianiques.
Ces païens scrutent le ciel. Sans doute que leurs croyances les laissent insatisfaits. Trouvent-ils dans ces astres un sens à leur vie ? Ont-ils le désir d’une connaissance plus profonde de la destinée de l’homme qu’ils pensent écrite dans les astres ? Heureux ceux qui s’interrogent ainsi ! Nos contemporains n’ont-ils pas aussi cette curiosité ? Nos publications ne sont-elles pas remplies de ces soi-disant secrets de bonheur écrits dans les astres ?
Un signe dans le ciel, un astre inconnu les interroge. Ils doivent donc se mettre en route pour le déchiffrer. Que celui qui, au cœur de ses interrogations, perçoit un signe sache se mettre en route, bousculer ses certitudes insatisfaisantes et continuer ses investigations !
Arrive alors ce moment où les questions qui viennent ne trouvent pas de réponse. Comme les mages, et Hérode avec ses conseillers qui en réfèrent au prophète Michée, il faut alors s’adresser à ceux qui ont quelques connaissances sur le sujet, interroger sans se lasser ceux qui ont la foi, en espérant qu’ils portent témoignage que celle-ci donne un sens à leur vie. En passant, cela suppose que ces croyants soient suffisamment instruits de leur foi pour donner des explications simples et claires. La lecture, non pas des astres, mais de la Parole de Dieu, vient souvent au secours de cette recherche. Même si nous peinons à croire qu’il suffit de distribuer des évangiles pour que le monde se convertisse, nous savons combien, depuis le jeune Augustin poussé par saint Ambroise à lire un texte sacré, que des phrases cueillies au hasard d’une lecture sont bien souvent un chemin vers une meilleure connaissance de celui dont parle la lecture en question.
Dieu vient alors au secours de celui qui cherche. Au sortir de la rencontre avec les conseillers d’Hérode, l’étoile luit de nouveau sur la route des mages et les conduit, dans la joie, à la grotte de Bethléem. Mais il leur a fallu dépasser leur surprise, pour ne pas dire leur déception, devant ce cadre inapproprié au roi qu’ils venaient honorer. Combien d’obstacles ne se dressent-ils pas à toute recherche de la vérité ! Tous les convertis nous en font la confidence quelquefois amère ou douloureuse. De combien de préjugés, d’orgueil intellectuel, ne faut-il pas se débarrasser pour accepter que Dieu vienne à nous de manière si humble !
Le retour des mages, « par un autre chemin », n’est pas sans enseignement. On ne peut pas trouver Jésus sans qu’il nous oblige à modifier notre route. Mais au terme de cette nouvelle route, Dieu nous accueille « dans la claire vision de sa splendeur. »

Père Thibault NICOLET