Paroisse Saint Loup


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Premier dimanche du Temps de Carême Année A

Dimanche 01 mars 2020 église Saint-Jean-Baptiste, Vif

Le Christ sauveur

Le Christ au désert nous montre avec force que vivre de Dieu est le seul bien qui soit. Tout mal consiste à se priver de Dieu pour s’attacher à un bien terrestre. Ce pain est bon, la santé de ceux qui ne heurtent pas les pierres est satisfaisante et le gouvernement des royaumes de la terre n’est pas mauvais mais tous ces biens, lorsqu’ils sont privés de Dieu, tombent en ruine, retournant à la poussière, et nous font plutôt mourir que vivre…
Après avoir été créés et placés dans le jardin d’Eden, nos premiers parents se laissent séduire par le diable, ici symbolisé par le serpent. C’est la chute d’Adam et Eve.
Bien que rachetés par le Christ, nous pouvons faire nôtre la prière du psaume 50, la prière du roi David, en nous reconnaissant pécheurs, à son exemple et à sa suite.
Saint Paul, quant à lui, considère toutes choses du côté du salut réalisé en Jésus-Christ et proposé à tout homme. Ses dimensions mêmes ne peuvent être perçues que dans la prise de conscience du péché qui règne dans le monde depuis les origines et dont l’humanité ne peut s’affranchir en-dehors de Jésus-Christ.
Jésus a beau être Dieu, il n’en est pas moins tenté par le démon. Mais désirant donner l’exemple à tous ceux qui le suivraient dans l’histoire, et dans sa sagesse parfaite, il ne succombe pas et c’est plutôt le diable qu’il met en déroute.
On dit souvent que le premier dimanche de carême est celui des tentations. Mieux vaudrait dire qu’il est le dimanche du choix, à l’exemple du Christ, le nouvel Adam. La gravité du premier péché est illustrée par le récit imagé de la Genèse et par les réflexions théologiques de Paul. Alors que, dans un cas, il est question d’Adam et Eve, dans l’autre, Paul ne parle que d’Adam, prototype de la race humaine, en vue de faire ressortir le rôle du Christ, nouvel Adam. Dans un cas comme dans l’autre, l’opposition joue entre l’un et le multiple. Alors que dans l’épître aux Galates Paul partait de l’histoire d’Abraham, c’est bien toute l’humanité dont il s’agit dans le passage de ce dimanche. L’universalisme caractérise la foi chrétienne. Dans cette épure théologique il n’y a pas à s’interroger sur les circonstances concrètes du drame initial. Deux réalités s’opposent : la mort et la vie. Nous dépassons alors le point de vue strictement biologique. Il n’y a pas à imaginer d’humanité sans l’idée de finitude. Pour Paul, la mort, personnifiée comme le péché, c’est la situation de l’homme coupé de Dieu, qui est la source de la vie. A la désobéissance d’Adam s’oppose l’obéissance du Christ (Romains V, 19). Au jugement de condamnation s’oppose le don de la grâce, sans qu’il y ait de correspondance stricte entre les deux. Le don gratuit de Dieu et la faute n’ont pas la même mesure (Romains V, 15). A la prolifération du péché s’oppose la surabondance de la grâce (Romains V, 20). Alors qu’a longtemps prévalu une lecture pessimiste de ce texte difficile, il convient de souligner qu’au-delà des drames de l’histoire la croix du Christ fait briller la lumière de la vie. L’Exultet de la nuit pascale nous fait chanter : O felix culpa ! Heureuse faute qui nous a valu un tel Rédempteur, un tel Sauveur !
Et le Christ sauve tout notre être. Ces quarante jours au désert viennent nous rappeler les quarante années d’errance du peuple d’Israël. C’est ainsi que le Sauveur retourne à la poussière pour faire sienne l’errance de son peuple en rejoignant le premier homme, Adam, tiré de cette poussière. C’est dans la Création que la tentation permit le péché, c’est en sa personne, vrai Dieu et vrai homme, que le Christ veut vaincre cette tentation, pour nous.
Le Christ sauve notre corps. Comme il avait tenté Eve par son fruit désirable, le tentateur propose au Christ de soulager sa faim. Car Jésus-Christ, vrai homme, a faim, comme nous avons faim de multiples désirs physiologiques ou charnels. Notre Seigneur élève ces désirs au seul bien qui peut les transcender sans les nier, à savoir la Parole de Dieu.
Le Christ sauve notre esprit. Comme il avait dupé nos premiers parents en ruinant leur confiance en Dieu (« Pas du tout, vous ne mourrez pas »), le tentateur propose au Christ de satisfaire un besoin de l’esprit humain : réduire sa confiance en Dieu en lui demandant des preuves. A cette confiance ruinée le Christ oppose la foi de celui qui se sait aimé de Dieu.
Le Christ sauve notre âme. Voyant que l’homme et la femme étaient faits pour Dieu, le serpent les trompa en leur proposant de devenir « comme des dieux » par la connaissance du mal (puisqu’ils vivaient déjà du bien). Avec le Christ, le démon use du même artifice : tenter de détourner son âme de l’adoration de Dieu vers l’idolâtrie (puissance, argent, vaine gloire). Le Seigneur se manifeste ici dans sa divinité en repoussant le mal.
Et nous voici donc après Lui, au début de ce Temps de Carême, afin qu’il élève notre être, notre corps, notre esprit et notre âme jusqu’au Créateur. Nous pouvons ainsi crier ces mots : « Abba, Père ! » et, grâce à Lui, repousser le mal en disant : « Arrière, Satan ! ».

Père Thibault NICOLET


Références des textes liturgiques :
Livre de la Genèse II, 7-9 ; III, 1-7a ; Psaume L (LI) ;
Épître de Saint Paul Apôtre aux Romains V, 12-19 ;
Évangile de Jésus-Christ selon saint Matthieu IV, 1-11.